Le syndrome de Diogène est une pathologie comportementale manifestée par la présence totale ou partielle de 4 symptômes : une accumulation compulsive d’objets, un manque d’hygiène, un isolement social et un déni de tout comportement déréglé.

Pourquoi syndrome ? Pourquoi Diogène ? Comment soigner les personnes atteintes et aider leur entourage ? Notre focus sur le Syndrome de Diogène décrira le comportement pathologique de ces personnes isolées au milieu de déchets.

Syndrome de Diogène : présentation

Le syndrome de Diogène est un trouble de comportement manifesté par des symptômes liés au mode vie du sujet atteint. Le Diogène souffre la plupart du temps de deux troubles qui présentent des signes distingués :

  • l’incurie : elle se traduit par une extrême négligence de l’hygiène corporelle.
  • la syllogomanie : il s’agit d’un TOC (trouble obsessionnel compulsif) traduit par une accumulation maladive d’objets et de déchets.

Ces symptômes sont accompagnés et aggravés par un déni et un refus de prise en charge. Les trois troubles (syndrome Diogène, Syllogomanie et Incurie) sont généralement signalés par la famille ou les voisins inquiets ou dérangés par des odeurs nauséabondes et des vermines provenant du lieu de vie de la personne atteinte : Un Diogène ne se dirige pas de son propre vers un centre de soins !

Il arrive aussi que les hôpitaux détectent fortuitement la présence des symptômes du syndrome à l’occasion d’une hospitalisation pour une autre cause. La confirmation est alors faite grâce à une visite sur les lieux d’habitation faite par la police, les pompiers, les SCHS (service social d’hygiène et de santé) ou d’autres services sociaux compétents.

Il importe de signaler que les encyclopédies de médecine n’utilisent pas le terme « maladie de Diogène » bien que ce trouble aie fait l’objet d’études cliniques publiées et de protocoles de soins recommandés.

Classification des personnes dites Diogène.

Les personnes Diogène présentent des symptômes communs (d’où l’appellation syndrome). Toutefois, les observations cliniques font ressortir plusieurs types de syndrome de Diogène :

  • le Diogène actif : il entasse chez lui toutes sortes d’objets récupérées dans la rue.
  • le Diogène passif : il se laisse envahir par ses déchets voire ses déjections.
  • le Diogène partiel : il présente une partie des symptômes. C’est le cas du célèbre philosophe grec Diogène (origine de l’appellation) qui présentait une incurie, une isolation sociale sans syllogomanie (il aurait préféré vivre dans un tonneau plutôt que de rejoindre la cours d’Alexandre le Grand en lui répliquant : « ôtes-toi de mon soleil »).
  • le Diogène total : il présente tous les symptômes du syndrome.

L’accumulation compulsive est le symptôme le plus fréquent. Il toucherait 90 % des personnes atteintes du syndrome de Diogène selon une étude française encadrée par la psycho gériatre Laurence Hugonot-Diene.

Existe-t-il un profil type de personne Diogène ?

Le syndrome de Diogène ne reconnaît pas les classifications de type CSP (couches sociales professionnelles). Il touche aussi bien les vieux que les jeunes et les riches que les démunis. D’ailleurs, les personnes Diogène étaient appelées jadis  » les nécessiteux thésaurisateurs « , car on trouvait beaucoup d’argent chez eux ou dans leurs vêtements sales après leur décès.

Les études réalisées montrent une concentration chez les populations suivantes :

  • les personnes âgées : particulièrement celles entre 70 et 80 ans ;
  • les femmes : deux cas féminins pour un cas masculin ;
  • les personnes vivant seules : 75 % des cas, avec une majorité de femmes veuves ;
  • les jeunes alcooliques, comme c’est affirmé par ce docteur spécialisé en le suivi des personnes souffrant de Syndrome de Diogène.

De même, une majorité des sujets semble développer ce comportement déréglé suite à un événement ressenti comme une rupture sociale ou existentielle : décès d’un proche, départ à la retraite, divorce, échecs répétitifs, perte d’un emploi, perte d’un statut social, etc.

Deux courants de pensée

Le premier, représenté par le gériatre américaine Allison N. Clark, affirme l’absence de toute pathologie psychiatrique ou d’altération cognitive chez la personne atteinte. À l’image du philosophe Diogène, il s’agit d’un mode de vie choisi (D’ailleurs, c’est le Dr Clark qui a inventé la référence avec Diogène). Ce courant qualifie le sujet Diogène de personne prédisposée, présentant des traits d’anxiété et une attitude de retrait face à un stress aigu.

Le deuxième courant est plus récent, il considère que près de 70 % des patients Diogène présentent des troubles psychiatriques : la démence, les délires paranoïaques, la dépendance à l’alcool, un dysfonctionnement du lobe frontal, la schizophrénie et des TOC (étude Halliday).

Syndrome de Diogène : que faire ?

Les personnes atteintes du syndrome de Diogène refusent d’admettre qu’elles ont un problème et rejettent toute proposition d’aide de la famille ou des services compétents. La prise en charge de ces situations médico-sociales délicates est compliquée. Plusieurs points d’ordre juridique voire philosophiques entrent en jeu (liberté de choisir son mode de vie versus menace pour autrui ou pour soi-même). La loi française ne prévoit pas d’obligation de soins à une personne qui jouit de ses pleines capacités.

La démarche entreprise lors d’une signalisation d’un suspect Diogène est de visiter son foyer, prendre contact avec sa famille, son entourage et son docteur pour faire une évaluation médico-sociale. Après concertation avec la famille, et éventuellement avec un juge en référé, un protocole de prise en charge est décidé.

Le point central – le plus délicat – est d’enlever les réticences. La proposition de l’aide doit être présentée et sentie comme un acte de bienveillance et d’amour (d’où le rôle de la famille). Si le sujet sent l’intervention de l’équipe soignante comme une intrusion, il risquerait de sombrer plus dans l’isolement voire se suicider.

La confiance est à créer progressivement au même titre que la présentation des bénéfices d’une vie en communauté. S’il s’agit d’un deuil qui n’a pas encore été fait ou d’émotions qui ont été mal gérées, un travail de psychothérapie sera bénéfique.

Une fois le consentement obtenu, la personne atteinte du syndrome de Diogène doit quitter son lieu de vie (possibilité de logement en famille ou dans un centre dédié). Les services sociaux, les associations et la famille ont un rôle d’accompagnement. Un nettoyage complet est alors réalisé par des entreprises spécialisées en nettoyage extrême (le segment est devenu porteur !) en concertation avec la famille et la personne atteinte pour ne pas détruire des objets et des souvenirs trop précieux.

Le retour à un mode de vie « normal « et à un lieu de vie salubre est à la portée des personnes atteintes de syndrome de Diogène. C’est une mission collective à accomplir de façon progressive.